Une attention particulière doit être portée à la transformation de phase quadratique – monoclinique (q-m), puisque, on le verra plus tard, elle est responsable à la fois des bonnes propriétés mécaniques de la zircone et de sa sensibilité au phénomène de vieillissement.
La transformation q-m dans la zircone est de nature martensitique. Par définition, une telle transformation est « un changement de structure cristalline (…) athermique, sans diffusion, et qui met en jeu des mouvements simultanés et coopératifs des atomes sur une distance inférieure à un diamètre atomique, et qui résulte en un changement de forme macroscopique des régions transformées »[1]. En conséquence de la nature displacive de cette transformation, il existe des correspondances cristallographiques entre la phase mère (quadratique) et la martensite (phase monoclinique), décrites par des directions de déformation (en cisaillement) et un plan d’habitat montrés schématiquement sur la figure 3.
Dans la zircone pure, la transformation de la phase quadratique (P42/nmc) vers la phase monoclinique (P21/c) se produit à ~950°C (Ms) au refroidissement et est caractérisée en particulier par une déformation en cisaillement d’amplitude of ~0,16 et une dilatation volumique de l’ordre de 0,05. La transformation est réversible et se produit autour de 1150°C (As) au chauffage. Le tableau 2 résume les paramètres de la transformation [2].
Lange [3] a été le premier à décrire la thermodynamique de la transformation q-m, en considérant le cas simple et idéal d’une particule sphérique incluse dans une matrice. Le changement de l’énergie libre totale (
(1)
où (< 0
quand T < T0 (q-m)) est l’énergie libre chimique (dépendante de
la température et de la composition),
(> 0)
est l’augmentation d’énergie mécanique (élastique) associée à la déformation de
la particule transformée (dépendante de la matrice, de la taille et de la forme
de la particule et de la présence de contraintes) et
(>
0) l’augmentation d’énergie libre associée à la création de nouvelles surfaces
(création de nouvelles interfaces particule – matrice et microfissuration).
En diminuant et en augmentant
, l’addition d’oxydes stabilisants comme Y2O3
(dans la zircone Y-TZP) diminue la force motrice de
la transformation q-m, et donc la température à laquelle elle se produit, comme
le montre les diagrammes de phase ZrO2-Y2O3
de la figure 2. Il est ainsi possible de retenir des
particules de zircone quadratiques métastables dans des pièces denses à
température ambiante, pour des taux d’yttrine supérieurs à 2 % molaire.
est directement lié au
module d’élasticité de la matrice environnante : un module élevé de la
matrice va augmenter
, stabilisant la phase quadratique.
est aussi
influencé directement par la présence de contraintes (internes ou
appliquées) : des contraintes de traction vont réduire
, déstabilisant la phase quadratique.
[1] Kelly PM, Rose LRF. 2002. The martensitic transformation in ceramics – Its role in transformation toughening. Progress in Materials Science. 47 : 463-557